Schizophrénie, bipolarité, dépression : quelles différences ?
Quelles différences existe-t-il entre les principales maladies psychiques, à savoir la schizophrénie, la dépression ou la bipolarité ? Souvent méconnues, elles font l’objet d’idées reçues qui peuvent avoir de lourdes conséquences pour les personnes atteintes. Tour d’horizon des symptômes des trois pathologies psychiques les plus fréquentes en France.
- La schizophrénie
La maladie, caractérisée par un ensemble de symptômes très variables, affecte le cerveau, altère les fonctions cognitives (mémoire, perception, appréciation des choix) et trouble le cours de la pensée. Les premiers symptômes se manifestent le plus souvent entre 15 et 30 ans et évoluent tout au long de la vie.
Il y a d’abord l’apparition de délires, ou d’hallucinations auditives, visuelles, olfactives… Les personnes malades « perçoivent des voix, voient des choses alors qu’il n’y a rien à voir », explique le professeur de psychiatrie Raphaël Gaillard, chef de pôle à l’hôpital Sainte-Anne à Paris et président de la fondation Deniker. « Ce sont les symptômes les plus visibles de la maladie. »
Ces symptômes sont dits « positifs », car ils s’accompagnent d’un fonctionnement psychique normal. A ceux-là s’ajoute la désorganisation. « Il y a une perte de l’unité du fonctionnement psychique », poursuit M. Gaillard. Cela entraîne un langage difficile à suivre, qui peut paraître incohérent, ainsi que des troubles de l’expression des émotions, en décalage avec ce que ressent la personne malade.
Viennent ensuite « le repli social, la perte d’initiative et d’envie », poursuit le professeur. C’est là que commence alors à apparaître une perte de capacité à construire quelque chose. Ces symptômes dits « négatifs » se caractérisent par une diminution des réactions et de l’expression émotionnelle. Au quotidien, ce sont les plus handicapants : incapacité à agir (apragmatisme), perte d’initiative, isolement…
Près de 600 000 personnes sont atteintes de la schizophrénie en France aujourd’hui. Un chiffre constant ces dernières années.
- Les troubles bipolaires
La bipolarité – qui touche environ 3 % de la population française – débute le plus souvent à la fin de l’adolescence, ou au début de l’âge adulte. Elle se caractérise par un dérèglement de l’humeur avec une succession de phases dépressives, alternant avec des phases d’exaltation, appelées épisodes maniaques. Ces fluctuations peuvent être si intenses qu’elles en deviennent insupportables pour la personne atteinte de bipolarité et son entourage.
De nombreux symptômes peuvent également apparaître lors de ces phases aiguës : idées délirantes, hallucinations ou désinhibition. La personne, qui subit également des troubles du sommeil et de l’appétit, va avoir tendance à s’isoler et pourra avoir des troubles du comportement. On peut également observer des troubles de concentration et des pertes de mémoire répétées. Ces symptômes tendent à disparaître sous traitement, ceux-ci permettant de limiter la fréquence et l’intensité des épisodes.
- La dépression
Comme pour les autres maladies psychiques, les symptômes de la dépression sont multiples. Lorsqu’une personne est atteinte d’humeur dépressive – environ 20 % de la population au moins une fois dans leur vie –, un sentiment de tristesse ou de vide est présent quotidiennement sans qu’il y ait de raison précise.
La personne atteinte de dépression est également victime de troubles du sommeil, de troubles cognitifs, d’un sentiment de dévalorisation ou encore d’une évolution de son poids, que ce soit une perte ou une prise de poids significative. Des idées noires peuvent également apparaître provoquant des envies de suicide, l’un des principaux risques de la dépression.
Schizophrénie : « Aujourd’hui, il est impossible d’avouer qu’on est malade »
Derrière ses petites lunettes, Roman a du mal à contenir sa joie : il vient de décrocher sa deuxième année de sociologie. Rien d’extraordinaire à première vue. Mais il s’est passé douze ans entre l’obtention de sa première et de sa deuxième année à l’université de Lorraine, à Nancy. Entre temps, Roman, 33 ans, « est passé par tous les états » : « bouffées délirantes », « hallucinations visuelles et olfactives », « impressions d’être extralucide », énumère-t-il lentement.
Roman est atteint de schizophrénie, une maladie qui touche environ 600 000 personnes en France. Les symptômes apparaissent généralement chez des personnes jeunes, entre 15 et 30 ans. Roman avait 19 ans, c’était en 2004. Il a été diagnostiqué « deux ou trois ans après », il ne se rappelle plus trop. Il ne sait pas non plus quel a été le déclencheur de la maladie, peut-être était-ce « son passé de toxicomane », lui qui consommait « dans un cadre festif » du cannabis, avant de se réfugier, plus tard, dans l’héroïne. Après l’apparition des premiers symptômes, Roman a été hospitalisé plusieurs fois et s’est vu prescrire « quasiment tous les médicaments », allant jusqu’à en prendre quinze par jour, ce qui l’a contraint à mettre ses études entre parenthèses.
Depuis six ans maintenant, Roman a complètement arrêté la drogue, ses « amis de came », et il va « beaucoup mieux ». Avec l’aide de sa famille, et de l’association nancéienne Espoir 54, qui aide depuis vingt ans les personnes atteintes de maladies psychiques à se reconstruire, il tente « de reprendre les rênes de sa vie ».
« Travail de Sisyphe » Mais si le travail de reconstruction se passe bien pour Roman, qui a mis dix ans à se remettre complètement sur pied, ce n’est pas le cas de toutes les personnes malades. Il est compliqué, encore aujourd’hui, pour une personne atteinte de schizophrénie de se réinsérer dans la…